Le sommeil ne relève pas uniquement de la sphère privée. Quand il devient insuffisant de manière chronique, il se transforme en dette de sommeil, avec des conséquences directes sur la santé et la performance des équipes.
En tant que RH, vous avez la possibilité (voire la responsabilité !) d’agir en prévention, mais aussi d’aider les collaborateurs concernés.
Cet article vous donne les clés pour sensibiliser, accompagner et aménager les conditions de travail face au sujet de la dette de sommeil de façon bienveillante et durable.
Qu’est-ce que la dette de sommeil ?
On appelle “dette de sommeil” l’accumulation d’un manque de sommeil par rapport aux besoins naturels du corps. Concrètement, la dette de sommeil représente le nombre d’heures de sommeil qu’il nous manque à l’issue de chaque nuit.
Selon les études de la National Sleep Foundation (NSF), une personne de 18 à 64 ans a besoin de minimum 6h de sommeil, et dans l’idéal de 7 à 9h. Après 65 ans, on a besoin de minimum 5 à 6h, et idéalement de 7 à 8h. Mais ces chiffres diffèrent d’une personne à l’autre, en fonction de plusieurs facteurs : physiologie, problèmes de santé, vigilance nécessaire pour les activités quotidiennes…
Les causes de la dette de sommeil sont variées :
- Un rythme de vie déséquilibré : horaires irréguliers, surcharge de travail, déplacements fréquents…
- Le stress ou l’anxiété : préoccupations professionnelles ou personnelles qui perturbent l’endormissement.
- La surcharge numérique : usage excessif des écrans le soir, qui trouble la production de mélatonine.
- Des obligations familiales : parentalité, aidants familiaux, vie domestique intense.
- Des troubles du sommeil non diagnostiqués : insomnie, apnée du sommeil…
- Un environnement de sommeil inadapté : bruit, lumière, température, mauvaise literie…
Et ce phénomène n’a rien de peu commun ! Selon une enquête INSV/Fondation Vinci Autoroutes, un quart des français dort moins de 6h par nuit en semaine - soit autant d’individus qui accumulent au moins une heure de dette de sommeil chaque nuit !
Quels sont les risques liés au manque de sommeil ?
La dette de sommeil n’est pas anodine : elle impacte progressivement les fonctions cognitives, physiques et émotionnelles de l’individu qui la subit.
Parmi ces symptômes, on peut notamment citer :
- De l’irritabilité et des sautes d’humeur, voire des symptômes anxieux ou dépressifs.
- Une somnolence diurne de plus en plus répétitive, notamment sur le lieu de travail.
- Une baisse de la vigilance, qui engendre des accidents domestiques, de la route, ou encore des oublis fréquents.
- Un impact sur la santé physique : à terme, la dette de sommeil favorise la prise de poids, la baisse des défenses immunitaires, l’apparition de troubles cardiovasculaires, et l’augmentation de la prédisposition à certaines maladies (hypertension, diabète, dépression, maladie d’Alzheimer…).
Au travail, cette dette de sommeil se traduit par une réelle diminution des performances cognitives. Le collaborateur qui en souffre connaît une baisse de concentration, commet des erreurs fréquentes et des oublis répétés. Il est également moins créatif et moins motivé. Accumulées, les heures de dette de sommeil peuvent accroître le risque de burn-out.
Qui plus est, la dette de sommeil peut engendrer des tensions avec des collègues ou des clients - des problèmes relationnels qui peuvent mener à une baisse de la productivité, voire des risques psychosociaux, pour toute l’équipe !
3 clés RH pour aider vos collaborateurs en dette de sommeil
Les RH ont un rôle clé à jouer dans la prévention et la gestion de la dette de sommeil. Voici trois axes sur lesquels vous pouvez agir concrètement.
Sensibiliser et informer
La dette de sommeil reste un sujet souvent sous-estimé en entreprise, alors qu’elle peut avoir des conséquences importantes sur la santé des collaborateurs et sur leur performance au travail. En tant que RH, vous avez un rôle clé à jouer pour briser le tabou autour du sommeil et mieux informer les équipes.
La première étape consiste à sensibiliser les collaborateurs aux effets du manque de sommeil, qu’il s’agisse de troubles de la concentration, d’irritabilité, de fatigue chronique ou d’un affaiblissement du système immunitaire. Ces impacts ne se limitent pas à la sphère privée : ils peuvent affecter directement la qualité du travail fourni, la sécurité, la collaboration et la motivation au sein des équipes.
Pour amorcer cette prise de conscience, vous pouvez :
- Organiser des ateliers ou conférences dédiés au sommeil, en faisant intervenir des spécialistes comme des médecins du sommeil, des psychologues ou des sophrologues. Ces experts pourront répondre aux questions, partager des conseils concrets et aider à mieux comprendre les mécanismes du sommeil.
- Diffuser des supports pédagogiques accessibles à tous, sous forme d’articles, de vidéos, d’infographies ou de newsletters. Ces contenus peuvent aborder des thématiques variées : l’importance d’un rythme régulier, les effets de la lumière bleue, l’alimentation avant le coucher, ou encore les stratégies de déconnexion après le travail.
En sensibilisant les collaborateurs de manière proactive, vous contribuez à déculpabiliser les difficultés liées au sommeil et à créer un environnement plus bienveillant, où le bien-être est pris en compte comme un levier de performance durable.
Favoriser une culture de l’équilibre vie professionnelle / vie personnelle
La prévention de la dette de sommeil passe aussi par une transformation des pratiques managériales et culturelles au sein de l’entreprise. En tant que RH, vous pouvez jouer un rôle moteur pour instaurer une culture du respect des rythmes biologiques et personnels.
L’un des leviers essentiels consiste à encourager le droit à la déconnexion. Concrètement, cela signifie d’éviter de solliciter les collaborateurs en dehors de leurs horaires de travail - que ce soit par e-mail, téléphone ou messagerie instantanée. Une attention particulière doit également être portée à l’organisation des réunions : programmer des échanges tôt le matin ou en fin de journée peut amplifier la fatigue, surtout pour des personnes déjà en dette de sommeil.
Mais ces bonnes pratiques ne peuvent porter leurs fruits sans l’implication active des managers. Il est donc indispensable de les former à repérer les signes de fatigue chronique chez leurs collaborateurs : baisse de concentration, irritabilité, erreurs inhabituelles, retards ou absentéisme ponctuel. Ces signaux d’alerte doivent être pris au sérieux et abordés avec bienveillance.
Les managers doivent également être exemplaires dans leur propre gestion du temps. Encourager leurs équipes à équilibrer vie professionnelle et vie personnelle, tout en envoyant des e-mails à minuit ou en multipliant les réunions tardives, envoie un message contradictoire. Incitez-les à adopter un rythme sain et à s’adapter aux besoins de leurs collaborateurs, pour installer durablement une culture d’entreprise qui respecte les temps de repos de chacun.
Aménager les conditions de travail
En tant que RH, vous pouvez aussi agir de manière concrète en aménageant les conditions de travail de vos collaborateurs, pour limiter les risques liés à la dette de sommeil. L’objectif est double : permettre aux individus concernés de récupérer plus facilement, et réduire les facteurs aggravants comme le stress ou un rythme de vie trop contraignant.
Un premier levier à envisager est la flexibilité des horaires de travail. Autorisez, dans la mesure du possible, un aménagement des horaires ou le télétravail pour les profils les plus fatigués. Ainsi, vous leur évitez les temps de transport, mais permettez également de mieux adapter leurs journées à leurs besoins physiologiques spécifiques. Ces ajustements ponctuels peuvent grandement aider les personnes en dette de sommeil à retrouver un rythme plus équilibré.
Dans certains environnements professionnels, il peut également être pertinent de prévoir des espaces dédiés au repos, où les collaborateurs peuvent faire une pause ou une courte sieste en toute discrétion. Même un temps de repos de 15 à 20 minutes peut suffire à améliorer la vigilance et la concentration. Bien sûr, ce type d’initiative doit s’adapter à la culture de l’entreprise et être bien accompagné pour éviter les idées reçues.
Enfin, il est essentiel d’offrir des solutions de soutien individuel aux collaborateurs en difficulté.
Cela peut passer par :
- Un accompagnement via le service de santé au travail, avec un médecin ou un psychologue du travail.
- La mise à disposition d’un coach spécialisé dans la gestion du sommeil ou la récupération.
- Une communication claire pour encourager les collaborateurs à consulter un professionnel de santé en cas de troubles du sommeil persistants (insomnies, réveils nocturnes, apnées du sommeil…).
Vous l’aurez compris : la dette de sommeil n’épargne personne, mais en vous rendant alerte au sujet, vous pouvez vraiment faire la différence pour vos collaborateurs. La dette de sommeil n’est pas une fatalité : à vous de créer les conditions du repos pour vos équipes.

Blogueuse RH & travail
Eléonor a une patte littéraire dans un gant de velours 2.0. Fascinée par les interactions humaines et l’univers du web, elle crée des contenus…