L’addiction au travail est un phénomène qui touche de nombreux salariés. Parmi les pratiques addictives les plus répandues, on trouve l’alcool, le tabac, le cannabis et les psychotropes (étude INRS). Avec le développement du télétravail, d’autres addictions ont fait leur apparition : l’hyperconnexion ou le workaholisme.
Concrètement, quelles sont les addictions au travail ? Quels sont les risques ? Et comment faire face à de telles pratiques en tant que RH ?
Quelles pratiques addictives peut-on trouver en entreprise ?
Bien que certains collaborateurs soient prédisposés à tomber dans l’addiction, la personnalité et la vie privée ne sont pas les seuls facteurs qui amènent à franchir la ligne rouge. L’environnement et les conditions de travail influencent également les comportements addictifs.
L'hyperconnexion
Selon Cindy Felio, chercheuse associée au laboratoire MICA de l'université Bordeaux-Montaigne, en France, 74% des salariés regardent leurs e-mails professionnels en dehors des heures de travail. De plus en plus de salariés rapportent que le traitement immédiat des e-mails est une source majeure de stress et une difficulté à surmonter au quotidien .
En 2021, le baromètre "hyperconnexion et santé" de BVA Fondation d'April révèle que 23% des individus déclarent développer une véritable dépendance au numérique, et selon l'INRS, 70% des managers déclarent souffrir de surcharge informationnelle.
Psychotropes, alcool, cannabis, anxiolytiques et workaholisme
Pour tenir le rythme éffréné ou oublier leur mal-être au travail, certains salariés trouvent "une solution pansement" dans la consommation de substances psychotropes comme les anxiolytiques, l'alcool ou le cannabis. D'autres vont jusqu'à développer une addiction au travail appelée le workaholisme.
Des addictions au travail qui varient selon les métiers
Chaque métier présente des risques spécifiques d’addictions. Par exemple, les professionnels du soin et social sont connus pour souffrir de tendinites aux épaules et aux coudes, de douleurs dorsales chroniques. Pour soulager ces maux, les médecins prescrivent des opiacés voire des morphiniques dans les formes les plus sévères. Lorsque les consommateurs sont peu ou pas suffisamment avertis des risques, ils peuvent tomber dans le piège de l’addiction.
Or, la dépendance s'accompagne toujours de conséquences néfastes pour le collaborateur et l'entreprise.
Pratiques addictives au travail : quels risques pour les salariés et l'entreprise ?
Les risques pour les salariés
- Le risque physique
Consommer de manière régulière de l’alcool, du tabac, des médicaments psychotropes a des conséquences sur la santé. Ainsi, la consommation d’alcool est responsable de plus de 200 maladies (cancers de l'œsophage, atteintes hépatiques…) et est la deuxième cause de mortalité prématurée en France selon l’Inserm. De même, les personnes accros aux écrans ont un mode de vie sédentaire qui favorise l’obésité, le diabète ou encore l’hypertension artérielle.
- Le risque psychologique
L’addiction s’accompagne généralement d’une baisse d’estime de soi, de tristesse et de dépression. À titre d’exemple, la consommation régulière d’opiacés accentue l’isolement et enferme les consommateurs dans une humeur basse comparable à la dépression. De même, les réseaux sociaux sont conçus pour sécréter de la dopamine, l’hormone du plaisir et du bien-être, de la motivation, mais aussi de l’addiction (reportage Dopamine, Arte).
- Le risque social
Lorsque des collaborateurs tombent dans l'addiction, ils vont avoir tendance à se renfermer et à s'isoler. Par honte bien souvent, le fossé entre eux et leurs collègues se creuse.
Les risques pour l'entreprise
Les pratiques addictives se répercutent sur l'entreprise. On peut les retrouver à plusieurs niveaux.
- Les risques au niveau individuel
Un salarié qui n’est pas bien psychologiquement est un salarié qui sera moins attentif, moins motivé, moins engagé et donc moins performant. Les signaux qui doivent alerter le manager sont :
- des erreurs répétées,
- des oublis,
- des résultats pas atteints,
un relationnel tendu.
- Les risques au niveau organisationnel
Un collaborateur dépendant a plus de probabilités de s’absenter. C’est le cas par exemple lorsqu’il est en arrêt de travail suite à un burn-out. Son absence se répercute sur l’équipe qui doit assumer une charge de travail supplémentaire.
Et si son absence perdure, le manager devra trouver un remplaçant. Un coût supplémentaire pour l’entreprise. Au-delà de l’augmentation de la charge de travail, c’est aussi le climat social et la productivité du service qui vont en pâtir.
C’est pour ces raisons que les RH doivent se saisir du sujet en définissant des actions de sensibilisation et de prévention.
Comment prévenir les pratiques addictives ?
Identifier les facteurs de risque
D'après les professionnels de santé, les facteurs qui favorisent le plus les pratiques addictives sont les risques psychosociaux (RPS), les horaires atypiques, le travail isolé, les pots en entreprise, les séminaires ainsi que le télétravail (étude INRS de novembre 2021). Vous l’aurez donc compris, la première chose à faire pour prévenir les comportements addictifs est d’identifier les pratiques et fonctionnements à risque dans l’organisation.
Pour cela, aidez vous de votre document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP). Identifiez pour chaque corps de métiers les conditions de travail. Qui pratique le télétravail ? Quels sont les métiers pénibles physiquement ? Vos commerciaux sont-ils sur les routes, en déplacement ? Faites-vous accompagner des représentants du personnel et de la médecine du travail pour une évaluation juste.
Dans votre audit, , n’oubliez pas de prendre en compte votre culture d’entreprise. After-work, culture de la performance... de nombreux facteurs peuvent avoir un impact sur les addictions.
Aussi, prêtez une attention particulière au style de management pratiqué dans votre organisation. Un manager dans l’hyper-contrôle, qui sollicite à n’importe quelle heure son équipe ne tient pas compte de l’équilibre vie privée/vie professionnelle. Ce qui peut entraîner une baisse de confiance en soi, de l’épuisement et un burn-out.
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Mettre en place des actions de prévention
Concrètement, quelles actions de prévention sont les plus pertinentes à mettre en place sur le plan collectif ? Une campagne de sensibilisation ? Des formations auprès des managers ? Des actes juridiques ? Tout ça à la fois ?
Prenons un exemple. Pour lutter contre l'hyperconnexion, plusieurs actions sont possibles :
- rédiger une charte sur la déconnexion,
- bloquer l’accès au serveur de l’entreprise passée une certaine heure,
- sensibiliser les collaborateurs à l’aide des représentants du personnel et de la médecine du travail,
- former les salariés à un usage raisonnable des outils de communication.
Solliciter des spécialistes de l'addiction au travail pour accompagner les salariés à la sortir de la dépendance
Si la prévention prévention est efficace, il se peut qu’un de vos collaborateurs ait besoin d’aide pour se libérer de son addiction. Ce n’est pas une tâche facile. Cela demande une posture d’écoute sincère et sans jugement et des compétences spécifiques. Mieux vaut faire appel à des experts : médecine du travail, psychologue du travail, cabinet externe spécialisé.
Finalement, prévenir l'addiction au travail semble être l'affaire de tous : managers, RH, entreprises et salariés.
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