Le 10 septembre 2025 restera une date marquante pour le droit du travail français. Ce jour-là, la Cour de cassation a opéré un revirement historique en reconnaissant enfin le droit pour un salarié de reporter ses congés payés en cas de maladie.
Quelles sont les nouvelles règles à appliquer ? Comment s'organiser concrètement ? Quel impact sur la gestion des congés et la paie ? Décryptage complet de cette évolution majeure pour les employeurs.
Arrêt maladie pendant les congés payés : le revirement de jurisprudence
La règle d’avant : pas de report possible des congés payés, même malade
Depuis 1996, la Cour de cassation française était formelle : un salarié tombant malade pendant ses congés payés ne pouvait pas en reporter la prise. Cette jurisprudence constante considérait que les congés étaient définitivement "consommés", même si le salarié était dans l'incapacité d'en profiter pleinement à cause d'un arrêt maladie.
Concrètement, si un collaborateur tombait malade le 3e jour de ses deux semaines de vacances, il perdait purement et simplement les jours restants. Cette position stricte s'appuyait sur le principe que les congés payés avaient pour seul objet de permettre au salarié de se reposer, indépendamment de son état de santé effectif.
La nouvelle règle : le droit au report des congés payés en cas de maladie
Mais le 10 septembre 2025, la Cour de cassation a opéré un revirement majeur. Elle reconnaît désormais le droit au report des congés en cas de maladie, mettant fin à près de 30 ans de jurisprudence contraire. Pour motiver sa décision, la cour explique que l’objectif des congés payés est de permettre au salarié « de se reposer et de disposer d'une période de détente et de loisirs, [et] diffère de celle du droit au congé de maladie, qui est accordé au travailleur afin qu'il puisse se rétablir d'une maladie ».
Cette nouvelle règle s'applique immédiatement à tous les arrêts maladie survenant pendant des congés payés à compter de cette date. Elle n'est pas rétroactive : les salariés tombés malades en vacances avant le 10 septembre 2025 ne peuvent donc pas réclamer le report de leurs congés perdus.
Avec cette décision, la France s’aligne avec la Cour de Justice de l’Union Européenne qui consacrait ce principe de report depuis 2012. La Commission européenne avait d'ailleurs mis en demeure notre pays le 18 juin dernier pour non-conformité au droit européen.
Report des congés payés en cas d’arrêt maladie : ce qui change concrètement
Conditions du report : pas de report sans justificatif médical
Pour bénéficier du report, le salarié doit impérativement fournir un arrêt de travail délivré par un médecin. Pas question donc de reporter ses congés sur simple déclaration de maladie. L'arrêt doit couvrir la période de maladie survenue pendant les congés initialement prévus.
Concrètement, si un collaborateur tombe malade le mercredi d'une semaine de congés, seuls les jours couverts par l'arrêt médical pourront être reportés. Les jours précédant la maladie restent définitivement consommés. Cette règle évite les abus tout en protégeant le salarié réellement empêché de se reposer.
Concernant la période de report, les congés "sauvés" devront être repris selon les modalités habituelles de prise de congés de l'entreprise. Ils ne donnent pas droit à une prise immédiate ou prioritaire.
Les procédures à mettre en place en entreprise : anticiper pour mieux gérer
L'employeur doit désormais s'attendre à recevoir des arrêts de travail pendant les périodes de congés de ses salariés. Il faudra alors ajuster le planning de congés et recalculer les soldes.
Le salarié malade en congé devra transmettre son arrêt dans les délais habituels - généralement 48 heures - mais aussi informer son employeur du souhait de reporter les jours concernés.
Côté documentation, l'entreprise devra tracer ces reports dans le dossier du salarié et mettre à jour ses outils de gestion des temps. Les congés reportés conservent leur nature de congés payés et devront être soldés avant la fin de la période de référence, sauf accord contraire.
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Arrêt maladie et congés payés : quel impact sur la gestion RH et la paie ?
Un casse-tête organisationnel en perspective
Les équipes RH vont devoir jongler avec des plannings de congés plus mouvants. Quand un salarié reporte une partie de ses vacances pour maladie, cela peut créer un effet domino sur l'organisation du service. Il faudra alors réajuster les plannings et potentiellement refuser d'autres demandes de congés.
Face à cette complexité croissante, s'équiper d'une solution de gestion des temps et des congés ou d'une solution complète de SIRH comme Eurécia devient indispensable lorsque les effectifs augmentent (au moins à partir de 25 salariés). Ces outils permettent de sécuriser les pratiques, d'éviter les erreurs de calcul et de tracer automatiquement les reports pour maladie. Ils facilitent aussi la mise à jour en temps réel des soldes et simplifient le suivi des provisions comptables.
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Répercussions sur la paie : des ajustements techniques nécessaires
Sur le bulletin de paie, aucun changement majeur n'est à prévoir. Les indemnités de congés payés continuent d'être versées selon les règles habituelles lors de la prise effective des congés reportés.
Cependant, les logiciels SIRH devront intégrer cette nouvelle fonctionnalité de report pour maladie pour distinguer les congés pris, les congés reportés pour maladie et les congés classiques restant à prendre.
Pour conclure, cette évolution jurisprudentielle impose aux employeurs d'adapter rapidement leurs procédures internes et de mettre à jour leurs logiciels de gestion des temps et congés ou leur SIRH. Il faut former les équipes RH à ces nouvelles règles et anticiper l'augmentation des demandes de report. Mieux vaut également informer dès maintenant l'ensemble des salariés de leurs nouveaux droits pour éviter les incompréhensions et les contentieux.
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Experte juridique & RH
Ancienne juriste et RH, Sonia n’a jamais tourné le dos à l’entreprise… même si son rêve était d’écrire des scénarios pour le cinéma. Aujourd’hui…