Le point RH légal : ce qu’il s’est passé en juin

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Le point RH légal : ce qu’il s’est passé en juin

Posté le - mis à jour le

Les vacances d’été arrivent à grands pas. Mais avant de se déconnecter, faisons un petit récap’ des nouveautés du mois de juin, avec notamment l’étude de quelques jurisprudences intéressantes. 

 

À noter que compte tenu du contexte politique, l’ensemble des projets de loi en cours d’examen sont pour le moment suspendus. Concernant la réforme de l’assurance chômage que nous vous avions présentée le mois dernier, Gabriel Attal vient également d’annoncer la non-publication du décret attendu au 1er juillet qui devait définir les nouvelles règles à compter du 1er décembre.

 

Jurisprudence : Inaptitude et rédaction de la dispense de reclassement 

En cas de déclaration d’inaptitude, le médecin du travail a la possibilité d’exonérer l’employeur de son obligation de reclassement s’il mentionne que « tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé » ou que « l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi ».

Mais attention, cette mention doit être expresse et scrupuleusement reprise dans l’avis du médecin du travail (article L1226-2-1). 

Dans cette affaire, un salarié était licencié pour inaptitude sans recherche de reclassement, l’avis du médecin du travail précisant que l’état de santé du salarié faisait obstacle à tout reclassement dans l’emploi.

L’utilisation de l’article défini « dans l’emploi » à la place de l’article indéfini « dans un emploi » tel que rédigé dans le code du travail a conduit le salarié à contester son licenciement. La cour d’appel de Riom lui donnera raison en considérant que la mention du médecin du travail ne pouvait s’assimiler à une dispense de reclassement générale et que l’employeur aurait dû rechercher des postes de reclassement. 

Dans son arrêt du 12 juin 2024 (n°23-13522), la Cour de Cassation casse l’arrêt de la Cour d’appel et confirme la dispense de reclassement en s’appuyant notamment sur un courriel complémentaire du médecin du travail qui confirmait la dispense de reclassement. 

Cette décision rappelle donc l’importance pour l’employeur d’être particulièrement vigilant quant à la rédaction de la dispense de reclassement par le médecin du travail.

Dans une autre décision récente (13/12/2023 n°22-19603), la Cour de cassation avait cette fois reconnu le licenciement pour inaptitude sans cause réelle et sérieuse car le médecin du travail avait indiqué que l’état de santé du salarié faisait obstacle sur le site à tout reclassement dans un emploi. L’employeur aurait donc dû effectuer des recherches de reclassement sur les autres établissements de l’entreprise. 

 

Jurisprudence : Temps partiel thérapeutique et calcul IDL

Dans un autre arrêt du 12 juin 2024 (n° 23-13975), la Cour de cassation se prononce sur le salaire à prendre en compte pour le calcul de l’indemnité de licenciement d’un salarié en temps partiel thérapeutique. 

Pour déterminer l’indemnité légale de licenciement, l’article R1234-4 du code du travail prévoit le calcul d’un salaire moyen de référence basé sur les 12 derniers mois ou les 3 derniers mois (au plus avantageux pour le salarié) précédant la rupture du contrat.

Lorsque que le salarié est à temps partiel, le salaire est proratisé ce qui impacte logiquement le salaire de référence et donc l’indemnité de licenciement perçue. 

La Cour de cassation vient cependant préciser que dans le cas d’un temps partiel thérapeutique, les indemnités de rupture doivent être calculées sur la base du salaire perçu avant la réduction du temps de travail et de l’éventuel arrêt maladie qui le précède. 

La Cour de cassation s’appuie sur le principe de non-discrimination du fait de l’état de santé pour justifier cette neutralisation du temps partiel thérapeutique.

 

Jurisprudence : rupture conventionnelle et vice du consentement de l’employeur

La Cour de Cassation s’est prononcée sur les effets d’une nullité d’une convention de rupture conventionnelle lorsque celle-ci est imputable au salarié. 

En l’espèce, un salarié et son employeur avaient signé une rupture conventionnelle pour permettre au salarié de suivre une formation et d’engager une reconversion professionnelle dans le management. Il s'est avéré qu’en réalité, le salarié avait déjà initié un projet de création d’une société concurrente à celle de l’entreprise avec deux anciens salariés de l’entreprise lors de la signature de la convention de rupture.

L’employeur a donc sollicité la nullité de la rupture conventionnelle pour vice du consentement en invoquant le dol du salarié qui avait volontairement dissimulé ses réelles intentions pour obtenir la rupture conventionnelle. 

Dans son arrêt du 19 juin 2024 (n° 23-10817), la Cour de cassation reconnait la nullité de la rupture conventionnelle et précise que la rupture du contrat produit les effets d’une démission. Le salarié est donc condamné à rembourser les indemnités de rupture versées par l’employeur. 

 

Élections professionnelles : invitation à la négociation du PAP 

Lors de la mise en place du CSE ou de son renouvellement, l’employeur a l’obligation d’ouvrir une négociation sur le protocole d’accord préélectoral (PAP) en invitant les organisations syndicales présentes dans son entreprise mais également les organisations syndicales représentatives au niveau national (à ce jour : CFDT, CGT, FO, CFTC et CFE-CGC). 

Cette négociation a pour objet de définir les modalités d’organisation et de déroulement des élections professionnelles. On va notamment y définir le nombre de sièges à pourvoir, leur répartition par collège électoral, les modalités de vote et le calendrier des différentes étapes de l’élection. 

En pratique, l’invitation à la négociation se fait par courrier écrit aux délégués syndicaux de l’entreprise et aux unions locales des syndicats. 

Le décret n°2024-514 du 6 juin 2024 vient préciser les mentions devant figurer dans cette invitation en créant un nouvel article D2314-1-1 dans le code du travail. 

Sont désormais obligatoires les indications suivantes : 

  • Le nom et adresse de l’employeur et si nécessaire de l’établissement ;

  • L’intitulé et l’identifiant (n°IDCC) de la convention collective de branche applicable ;

  • Le lieu, la date et l’heure de la première réunion de négociation. 

⚠️ Attention : Pour rappel, un délai de 15 jours minimum doit être respecté entre l’invitation et la première réunion de négociation afin de permettre aux organisations syndicales de s’organiser (article L2314-5 alinéa 4). 

💡 Le saviez-vous ? Le ministère du travail met à disposition un simulateur en ligne du calendrier des élections professionnelles. Retrouvez-le ici

 

Élus du CSE : guide de sensibilisation à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et les discriminations. 

Dans le cadre du Plan de lutte contre le racisme, l’antisémitisme et les discriminations liées à l’origine 2023-2026, le ministère du Travail a réalisé, en lien avec les partenaires sociaux et le Défenseur des droits, un guide de sensibilisation des membres des comités sociaux et économiques (CSE) pour mieux les informer sur leur rôle en matière de lutte contre l’ensemble des discriminations et renforcer le dialogue social sur ces thèmes. 

L’emploi est le secteur de la vie sociale où les discriminations en raison de l’origine apparaissent les plus aiguës, que ce soit dans l’accès à l’emploi ou au cours de la carrière.

 

JO 2024 : déplacements des salariés et représentants du personnel au sein des zones sécurisées

Pour accéder aux périmètres sécurisés pendant les Jeux olympiques et paralympiques 2024, un dispositif d'autorisation administrative a été mis en place avec délivrance d’un QR Code. 

Dans un questions/réponses publié le 24 juin dernier, le Ministère du travail : 

  • confirme que cette autorisation s’imposera également aux salariés devant circuler au sein de ces zones pour leur activité professionnelle. 

Il revient à l’employeur d’informer le plus tôt possible les salariés concernés pour qu’ils effectuent eux-mêmes leur demande sur la plateforme numérique dédiée pass-jeux.gouv.fr. 

  • En cas de refus du salarié d’effectuer les démarches nécessaires ou de refus de délivrance du QR Code par la préfecture, le ministère du travail encourage en premier lieu l’employeur à affecter temporairement le salarié concerné à d’autres missions, ces refus ne pouvant être considérés comme fautifs. 

En cas d’impossibilité de réorganisation, le salarié ne pouvant plus effectuer son travail, l’employeur aurait alors la possibilité de ne pas verser la rémunération correspondant au travail non réalisé. 

  •  Enfin, le questions/réponses précise que les représentants du personnel doivent également disposer d’une autorisation, leur liberté de circulation devant s’articuler avec les règles du code de la sécurité intérieure.

 

L’actu légale fait une petite pause pour l’été. Bonnes vacances bien méritées à tous et RDV à la rentrée ! 

 

 

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Cet article a été rédigé par Joanne Thomassin

Consultante et formatrice en droit social et ressources humaines

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