A moins que vous ayez passé le mois d’avril dans une grotte (ou en vacances à l’autre bout du monde), vous n’avez pas pu passer à côté de la « news » du mois : la nouvelle loi sur les CP est enfin arrivée ! Bon déjà que la gestion des congés n’était pas un long fleuve tranquille, il va falloir maintenant assurer la mise en œuvre opérationnelle des nouvelles règles… C’est assez technique alors prenons une grande respiration et allons-y !
Congés payés et arrêt de travail : clap de fin !
Elle était attendue depuis plusieurs mois suite aux arrêts retentissants de la Cour de cassation du 13 septembre 2023 : la loi n° 2024-364 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’UE amendée pour encadrer les règles d’acquisition des congés pendant un arrêt de travail a été publiée au Journal officiel le 23 avril dernier et s’applique donc dès le 24 avril 2024. Aucune saisine du Conseil constitutionnel n’a finalement été déposée.
Les nouveaux articles du code du travail viennent donc profondément modifier les règles d’articulation entre arrêt de travail et congés payés :
- La nouvelle rédaction de l’article L.3141-5 prévoit que sont désormais considérées comme des périodes de travail effectif pour l’acquisition de congés payés :
- Les arrêts de travail consécutifs à un accident de travail ou une maladie professionnelle sans limite de durée (alinéa 5 modifié),
- Les arrêts de travail liés à un accident ou à une maladie n’ayant pas un caractère professionnel (nouvel alinéa 7).
- Dans le cas d’un arrêt de travail non professionnel, la durée du congé auquel le salarié a droit est de deux jours ouvrables par mois dans la limite de 4 semaines par période de référence (nouvel article L3141-5-1). A noter que dans le cas d’une acquisition en jours ouvrés, l’acquisition sera donc de 1,67 jours ouvrés par mois.
- Le salarié qui ne pourrait pas prendre au cours de la période de prise les congés acquis avant et pendant son arrêt de travail dispose d’une période de report de 15 mois afin de pouvoir les utiliser (nouvel article L3141-19-1). Au-delà de cette période, les congés non pris seront perdus.
Accrochez-vous, c’est à partir de là que les choses se compliquent ! Cette période de report ne se déclenchera qu’à compter de l’information faite par l’employeur au retour de l’arrêt de travail du salarié.
Le nouvel article L.3141-19-3 impose effectivement à l’employeur d’informer dans un délai d’un mois suivant la reprise le salarié de ses droits à congés et de la date limite pour les prendre. Cette information doit obligatoirement se faire par écrit, la loi précisant qu’une mention sur le bulletin de paie est possible.
En pratique, rappelons qu’il est tout à fait possible en accord avec l’employeur que le salarié prenne ses congés immédiatement après son arrêt de travail et ce sans avoir besoin de retravailler une journée (une fausse croyance RH répandue !)
Par exception, si le salarié est en arrêt de travail depuis au moins un an à la date à laquelle s’achève la période de référence au titre de laquelle les congés ont été acquis, le point de départ du délai de 15 mois est fixé à la fin de cette période d’acquisition et ce sans information écrite nécessaire de la part de l’employeur (nouvel article L.3141-19-2).
Si la période de report n’est pas expirée à la date de reprise du travail, elle est suspendue jusqu’à ce que le salarié reçoive les informations sur ses droits à congés payés.
Alors prenons un exemple pour mieux comprendre : dans une entreprise appliquant la période d’acquisition légale du 1er juin au 31 mai, un salarié absent sur l’ensemble de la période d’acquisition 2023/2024 aura jusqu’au 31 août 2025 maximum pour prendre ses 24 jours ouvrables de congés (déclenchement de la période de report de 15 mois au 1er juin 2024).
- Si le salarié n’a toujours pas repris le travail au 31 août 2025, ses 24 jours de CP acquis pour la période 2023/2024 seront perdus. Cette règle évite donc un droit au congé illimité.
- Si le salarié reprend le travail avant le 31 août 2025, l’employeur devra l’informer par écrit au plus tôt et dans un délai maximum de 1 mois de ses droits à CP car la période de report est alors suspendue jusqu’à réception de cette information par le salarié. Pour une reprise par exemple le 1er mars 2025, si l’employeur informe par écrit le salarié de ses droits le 15 mars 2025, la fin de la période de report sera décalée de 15 jours soit au 15 septembre 2025.
Les textes viennent préciser qu’un accord d’entreprise ou de branche pourra fixer une durée de période de report supérieure à 15 mois.
Ces nouvelles règles pour les arrêts de travail non professionnels s’appliquent de manière rétroactive au 1er décembre 2009. Cette rétroactivité ne devra cependant pas permettre à un salarié de bénéficier de plus de 24 jours ouvrables sur une même période de référence après prise en compte de l’ensemble des jours de congés déjà acquis par ailleurs. En cas de désaccord avec l’employeur sur d’éventuelles régularisation à effectuer, les salariés dont le contrat est toujours en cours auront un délai de 2 ans pour engager une action judiciaire, soit jusqu’au 24 avril 2026.
Pour les anciens salariés, la loi n’apporte aucune précision. Le délai de prescription de 3 ans applicable aux salaires s’applique donc par défaut. Tout salarié ayant donc quitté l’entreprise avant le 24 avril 2021 ne pourra donc plus intenter d’action.
- Ces nouvelles règles viennent également impacter le calcul de l’indemnité de congés payés selon la règle du « dixième ». L’article L.3141-24 (I-4°) modifié précise que les absences pour arrêt non professionnels sont considérées comme ayant donné lieu à rémunération dans la limite de 80%.
L’ensemble de ces nouvelles règles sont applicables depuis le 24 avril dernier et il est fort probable que leur mise en œuvre entraînera de nombreuses questions. Nous tâcherons de vous apporter des précisions au fur et à mesure.
Formation : reste à charge de 100 € pour l’utilisation du CPF
Autre actualité attendue dont nous vous parlions dans l’article du mois de février, un projet de décret a été présenté courant avril aux partenaires sociaux pour instaurer une participation financière du salarié lors de l’utilisation de son compte personnel de formation (CPF).
Ce projet prévoit finalement une somme forfaitaire de 100€, montant qui serait réévalué chaque année selon l’inflation.
Les demandeurs d’emploi et les titulaires de CPF qui suivent une formation qui fait l’objet d’un abondement de leur employeur n’auraient pas à supporter ce reste à charge.
Ce décret devrait entrer en application le 1er mai 2024.
Jurisprudence : prestations du CSE et condition d’ancienneté
Dans un arrêt du 3 avril 2024 (cass soc. n°22-16812), la Cour de cassation vient pour la première fois statuer qu’un comité social et économique (CSE) ne peut limiter l’accès de ses activités sociales et culturelles à une condition d’ancienneté (billetterie, bons d’achat…).
Jusqu’à présent, l’URSSAF tolérait qu’un CSE puisse retenir une ancienneté allant jusqu’à 6 mois maximum. Des salariés en CDD de courte durée par exemple ne pouvaient alors pas bénéficier des prestations du CSE.
Il résulte de cette décision que désormais les salariés doivent avoir accès aux activités sociales et culturelles mises en place par le CSE dès leur embauche même pour un contrat de quelques jours.
Barème kilométrique : pas de revalorisation pour 2024
Le barème kilométrique 2024 pour se faire rembourser ses frais ou pour calculer les frais réels sur la prochaine déclaration de revenus 2023 n’est pas revalorisé et reste identique à celui en vigueur pour les revenus de l'année précédente.
Retrouvez le barème kilométrique complet.
Je m'abonne !