Comment exploiter les talents des slasheurs en entreprise ?

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Comment exploiter les talents des slasheurs en entreprise ?

Posté le - mis à jour le

Ils sont développeur web / coach / maraîcher ou journaliste / formatrice / sculpteuse... Chez les slasheurs, avoir plusieurs métiers est un choix. Selon une étude menée en 20151, ils seraient déjà 4,5 millions en France, soit 16 % de la population active.

Pour en savoir plus sur ces profils atypiques, nous avons rencontré Marielle Barbe, coach / formatrice / consultante / conférencière / auteure, bref, slasheuse évidemment ! Publié aux éditions Marabout, son livre Profession Slasheur est un guide pratique pour les pluriactifs comme elle. Aujourd’hui, elle accompagne les individus et les entreprises pour favoriser l’expression de ces multiples potentiels. Mais justement, comment les mettre au service de l’entreprise ?

Que veut dire slasher ou slasheur ?

Un slasheur exerce plusieurs métiers, par obligation économique ou par choix, même si c’est ici la deuxième catégorie qui nous intéresse. Le terme fait référence à la barre oblique « / » (slash, en anglais). On peut rapprocher cette notion du « multipotentialiste » décrit par la coach Émilie Wapnick2.

Curieux, enthousiastes, polyvalents, les slasheurs ont toujours soif d’apprendre et ne peuvent se satisfaire d’une seule activité. Ils ont cette aptitude à faire des liens, à créer des ponts entre des domaines ou des thèmes a priori étanches. C’est d’ailleurs leur principal atout.

Longtemps considérés comme des touche-à-tout incapables de s’investir sur le long terme, ou comme des éternels insatisfaits, les slasheurs commencent à affirmer et surtout revendiquer leur mode de fonctionnement.

La culture française valorisant plutôt l’expertise, ces professionnels ont souvent du mal à trouver leur place dans l’entreprise, tandis qu’aux États-Unis, ils sont recherchés et appréciés pour leur adaptabilité et leur créativité. Mais même dans l’Hexagone, les choses changent petit à petit…

Le slasheur, témoin d’une révolution du travail ?

D’après Marielle Barbe, le slasheur est à la fois l’expression et l’acteur majeur d’un changement dans notre rapport au travail : « Avant, on voulait un travail et de l’argent pour acheter une maison, une voiture, partir en vacances… Aujourd’hui, ce modèle ne marche plus : les jeunes font des études longues pour trouver des jobs inintéressants où on les paie au SMIC. »

Oui, il est fini le temps du plein-emploi et de la retraite confortable… Alors, les nouveaux actifs recherchent davantage l’épanouissement personnel, le sens, l’équilibre entre vie personnelle et professionnelle.

Mais ce n’est pas qu’un phénomène générationnel, souligne Marielle Barbe. Si 22 % des moins de 30 ans cumulent deux emplois, il y a des slasheurs de tous âges et de tous milieux.

Les slasheurs ne sont pas tous entrepreneurs ou freelance

Parce qu’ils ne trouvaient pas leur place dans des entreprises qui s’accrochent à de vieux modèles, beaucoup de pluriactifs se sont lancés à leur compte. Avec parfois des situations aberrantes : « J’ai rencontré des slasheurs qui cumulaient quatre statuts ! » s’exclame Marielle Barbe, pour qui la législation ne suit pas assez vite les évolutions du travail.

Oui, la vie d’entrepreneur est loin d’être toujours rose. Et si certains tiennent à leur indépendance, d’autres ne souhaitent pas tenter l’aventure en solitaire. Quelles solutions pour ces slasheurs dans l’âme qui préfèrent rester salariés ? Les pluriactifs sont-ils condamnés à choisir entre s’ennuyer en entreprise ou galérer à cumuler les jobs ?

Comment faire des slasheurs une valeur ajoutée pour l’entreprise ?

Deux questions nous taraudent. Peut-on accompagner les slasheurs pour leur permettre de s’épanouir au sein de l’entreprise ? Comment bien manager les profils atypiques pour en faire des atouts ? « Pour l’instant, on ne peut pas dire que les solutions fleurissent dans les entreprises, regrette Marielle Barbe. Ça veut dire que tout est à inventer ! »

Nous évoquons plusieurs pistes pour redonner aux slasheurs le goût du salariat… Et plus généralement, mettre des talents multiples au service d’un même projet d’entreprise. De nos échanges, nous retenons trois points importants :

  • Bousculer la routine : « La routine est un poison pour notre cerveau, explique Marielle Barbe. » Malheureusement, c’est assez inhérent à l’entreprise… Pour en sortir, pas besoin d’aller chercher midi à quatorze heures : « Ça peut tout simplement être d’aller travailler en dehors des murs de l’entreprise, de varier les tâches… »
  • Varier les missions : Les respirations dans le travail sont essentielles : « Les collaborateurs seraient même plus efficaces s’ils faisaient parfois autre chose que ce qui est écrit dans leur fiche de poste. » La slasheuse suggère ainsi d’occuper une petite portion de son temps de travail à autre chose que ses missions : « C’est ce qui nous nourrit et nous redonne de l’énergie ».
  • Questionner les envies et besoins des salariés : Marielle Barbe évoque l’exemple d’un salarié, apiculteur amateur, qui aurait pu animer la ruche de son entreprise… Si seulement ses supérieurs avaient eu connaissance de cet intérêt ! « L’obsession de l’expertise et le clivage des compétences conduisent à des situations absurdes : on va chercher des compétences hors de l’entreprise, alors qu’elles y sont déjà. C’est un gâchis de talent et d’enthousiasme, engendrant du mal-être au travail, des burn-out, des bore-out… »

À travers le slashing, c’est une autre définition du bonheur au travail que nous propose Marielle Barbe, loin des images un peu caricaturales proposées par certaines start-up : « L’apparition des "Chief Happiness Officer" m’interroge. Avant d’installer une table de ping-pong ou des poufs, il faudrait d’abord demander aux salariés ce dont ils ont besoin. »

Quels outils RH pour tirer parti des profils slasheurs ?

Résumons. Bouleverser la routine, varier les activités, et surtout être à l’écoute des envies et besoins : il ne reste plus aux managers qu’à questionner leurs équipes, non ? « En France, on n’est pas dans cette culture-là, explique notre interlocutrice. On n’a pas non plus les outils : on demande à un DRH d’être efficace, pas de faire plaisir aux personnes. »

« Aujourd’hui, les entreprises disposent des bons outils pour mesurer l’acquisition des compétences, mais elles n’ont rien pour accompagner l’évolution des envies », poursuit-elle. Or, le développement rapide de nouvelles compétences peut justement bouleverser ces envies… Entraînant le départ de salariés que l’entreprise a formé.

Cette question des outils passionne Marielle Barbe, qui en élabore actuellement un « permettant de prendre en compte la personne dans sa complétude, pour que l’évolution professionnelle ne soit plus dé-corrélée de l’évolution personnelle. »

En clair, l’apparition des slasheurs questionne et bouscule la gestion des ressources humaines. Mais le changement, n’est-ce pas ce qu’il y a de plus excitant ?

Quel futur pour les slasheurs salariés ?

Dans ses nombreux métiers, Marielle Barbe accompagne les entreprises qui souhaitent développer leurs multiples potentiels et leur agilité.

« Pour l’instant, j’interviens de manière assez anecdotique. On s’amuse bien pendant deux heures, mais il n’y a pas de changement d’envergure derrière. Pourtant, les retours sont très positifs. Je ne pensais pas que ce serait aussi bien accueilli. »

Malgré tout, elle reste assez confiante dans le changement qui s’est enclenché :

« On est à un moment génial : il y a le télétravail, l’intrapreneuriat, le congé sabbatique… Plein de gens qui ne sont plus à leur place à leur poste et qui osent proposer d’autres choses à leur entreprise. De plus en plus de slasheurs s’assument et essaient de trouver des solutions en interne pour mieux se positionner, pour ne plus être sous-employé. »

Car c’est bien de ça qu’il s’agit : des potentiels sous-exploités. Aujourd’hui, des postes « hybrides » commencent à apparaître dans les entreprises, mais les personnes qui les occupent sont rapidement pénalisées en termes d’avancée de carrière, par rapport à des profils plus spécialisés.

Face à des salariés de plus en plus capables d’expliquer en quoi être slasheur est une valeur ajoutée, reste aux entreprises de savoir bien employer ces profils hybrides. Au travail !

 

Crédit photo : Vincent Nageotte / My Little Paris 

 

Cet article a été rédigé par Team Market

Équipe Interne

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