Une nouvelle fonction est récemment apparue dans les entreprises - dans les startup comme dans les grandes entreprises - dédiée au bien-être des collaborateurs. Ce job repose sur l’idée sensée que les salariés heureux sont plus performants au travail que ceux qui sont moins engagés. Et ce métier vous le connaissez tous, popularité médiatique oblige, c’est celui de Chief Happiness Officer ou CHO.
Le recrutement d’un CHO part d’une bonne intention, mais dans les faits, ce poste est-il nécessaire pour que les collaborateurs se sentent « heureux » au travail ? Et si la clé était déjà dans l’entreprise, parmi les salariés, leur personnalité et leurs fonctions ?
CHO, n’est-ce pas déjà les missions du service RH ?
Au-delà des enjeux financiers et économiques, la raison d'être d'une entreprise et plus particulièrement de la DRH, c’est de répondre aux attentes des salariés, notamment en contribuant à leur mieux-être au travail. Ainsi, l’entreprise à sa part de responsabilité mais la contribution du salarié est tout aussi essentielle.
Je me suis moi-même posé la question chez Eurécia : dois-je recruter un CHO ? L’intention est très bonne mais pour moi, la démarche est mauvaise. Le bonheur en entreprise ne se décrète pas.
C’est comme le 31 décembre, on impose aux gens de faire la fête et d’être heureux ce jour-là. On ne peut pas forcer les gens à être heureux.
L'entreprise a un double objectif : être rentable, performante d’un point de vue financier et économique, et répondre aux attentes de la société et des salariés en contribuant au mieux-être dans l’entreprise. Nous sommes tous conditionnés par la rationalisation de nos problèmes et la nécessité de trouver une recette magique.
Soyons sérieux ! Comment pourrait-on confier à un stagiaire ou à une tierce personne ce qui est de notre responsabilité ? Le bien-être au travail devrait être la responsabilité de tous et aujourd’hui nous avons tendance à se dédouaner de cela.
Pascal Grémiaux, CEO d’Eurécia
Visionner le replay de l'émission du Club Media RH sur BFM Business - Solutions RH: Comment impliquer les collaborateurs d'une entreprise sur le bien-être au travail ? - 03/06
Au-delà de l’animation interne, les missions du CHO sont nombreuses : réduction du stress, réduction de l’absentéisme, intégration des valeurs de l’entreprise et médiation. Et tout comme la RSE, le bien-être au travail ne doit pas être une réflexion à part mais bien une démarche sincère et intégrée dans les processus de l’entreprise et par conséquent, porté par l’ensemble des acteurs de l’entreprise.
C’est d’ailleurs paradoxal quand on voit qu’aujourd’hui ce poste est ouvert, dans 38% des cas à des stagiaires ! Preuve que les entreprises n’ont pas encore conscience du réel potentiel qui existe en leur sein.
Et si on transformait les collaborateurs en Salariés Socialement Responsables (SSR) ?
Les salariés n’ont-ils pas un rôle à jouer en tant qu’acteurs de leur épanouissement dans leur entreprise, mais aussi dans le développement de la culture d’entreprise ?
Passé l’effet « wahou ! » de l’annonce du poste de responsable du bonheur, qui permet bien souvent de donner une belle image de la société et développer la marque employeur, ne serait-il pas intéressant et plus efficace d’utiliser ses propres richesses ?
A mi-chemin entre communication interne, ressources humaines et événementiel le poste existe forcément dans chacune des entreprises ! Et si c'était l'occasion de créer une vraie dynamique dans l'entreprise ? Ne serait-il pas plus judicieux d'installer la culture de l'entreprise à tous les étages et de faire en sorte que chacun des salariés soit l'ambassadeur parmi les ambassadeurs ?
"Je suis tout à fait d’accord avec le fait que le bien-être des salariés et le besoin de les faire adhérer à la culture de l’entreprise ne peuvent pas et ne doivent pas être portés par une seule et même personne. J'ai déjà du mal à imaginer que l’on puisse pousser les collaborateurs à « être heureux »...
Ce n’est pas en leur offrant un pique-nique tous les mois qu’une bonne ambiance va se développer ou que l’absentéisme va diminuer. En effet, j’ai chapoté les deux derniers springbreak (weekend teambulding) d’Eurécia et certains évènements en interne, mais n’en garde jamais le monopole. Bien souvent, je travaille en collaboration avec mes collègues. Cela peut être l’assistante de direction ou la responsable marketing. D’ailleurs, au dernier springbreak, Pauline ingénieur à la R&D m’a aidé à organiser un jeu dans le bus. Les salariés vont même jusqu’à organiser en autonomie des évènements en interne. Par exemple, Cateline, Product Manager, vient d’organiser un tournoi de babyfoot. La prise d’initiative est bon signe, cela montre que les salariés se sentent intégrés, utiles et portent le reste de l’équipe.
Pour moi, il est toutefois important d’avoir quelqu’un de moteur dans la démarche pour rappeler à l’ensemble des salariés qu’ils ont la possibilité de réaliser des projets et d’être acteurs au quotidien dans toutes ces petites activités qui font notre unité. Il y a aussi une dimension de taille d’entreprise. Nous sommes une PME et la communication reste encore facile entre les collaborateurs, mais peut-on appliquer les mêmes initiatives dans un grand groupe ? Le CHO serait alors peut-être, plus légitime."
Jennifer Delmas, chargée de communication chez Eurécia
Concrètement, comment on fait ?
C’est à la direction et au service RH d’aider les managers à insuffler ce changement de direction via un management ouvert.
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Instaurer un climat de confiance : la communication est essentielle dans cette démarche. Il faut donner le maximum de transparence dans toutes les actions faites et toutes les décisions prises.
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Management par objectifs : il est important de motiver les équipes. Le management par objectifs permet de challenger les collaborateurs, de les motiver à arriver jusqu’au bout, de les conforter dans leurs missions et de les féliciter. Attention tout de même à ne pas en abuser au risque qu’ils pensent que vous ne leurs faites pas confiance.
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Valorisation de l'erreur : il est capital de rassurer les collaborateurs en leur disant que l’erreur peut arriver et que si elle arrive ce n’est pas si grave. Il suffit qu’elle ne soit ni volontaire ni répétitive.
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Culture de l'amélioration continue : créer cette dynamique permet d’engager tous les collaborateurs autour de projets transversaux et les motive à les mener à bien.
Qu'on les appelle SSR ou salariés sourires ou acteurs de la vie d'entreprise, chaque salarié à son rôle à jouer. Le succès de tous dépend de chacun.
Le plaisir est au travail, ce que le coeur est à la raison.