Les conventions au forfait jours, organisées par la loi Aubry sur les 35h, sont mises à mal depuis que la Cour de Cassation, en 2012, a épinglé successivement les conventions collectives nationales de la chimie, puis celle de l’industrie de l’habillement, celle du commerce de gros et plus récemment, en avril 2013, celle du Syntec, pour leur non respect du droit.
Cette montée en flèche des contentieux, initiés par les cadres et salariés réclamant des heures supplémentaires, risque de coûter cher aux entreprises ne se conformant pas aux conditions jurisprudentielles fixées par la Cour de Cassation.
Comme le rappelle à juste titre Maître Franc Muller, « la durée légale du travail s’applique également aux cadres, quand bien même ceux-ci auraient conclu une convention de forfaits jours sur l’année ».
Précisions sur ce que dit la loi.
Qu’est ce qu’un forfait jours ?
Selon l’article L.3121-42, peuvent conclure une convention de forfait en heures sur l’année, dans la limite de la durée annuelle de travail applicable aux conventions individuelles de forfait fixée par l’accord collectif :
1. Les cadres dont la nature des fonctions ne les conduit pas à suivre l’horaire collectif applicable au sein de l’atelier, du service ou de l’équipe auquel ils sont intégrés ;
2. Les salariés qui disposent d’une réelle autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps.
Ce forfait permet un décompte du temps de travail basé sur le nombre de jours travaillés sur l’année et non sur le nombre d’heures travaillées par jour ou par semaine. Ce décompte étant défini préalablement dans un accord collectif, dans la limite de 218 jours par an.
Qui prouve quoi ?
La jurisprudence est claire en ce sens, depuis un arrêt du 17 octobre 2012, confirmé le 20 février 2013 (Cass.Soc. 17 octobre 2012 n°10-17370 et 20 février n°11-28811), en cas de litige de preuve des heures supplémentaires, c’est à l’employeur et à lui seul, d’apporter les éléments de nature à justifier les horaires effectifs réalisés par le salarié. Le juge formant alors sa propre conviction.
Nonobstant, deux autres arrêts plus récents du 18 septembre 2013 (Cass. soc 18 septembre 2013 n°12-10025 et n°10-28284) rappellent que le salarié peut lui-même apporter des pièces justifiant de leurs heures supplémentaires réalisées.
Ces deux arrêts précisent d’une part, que le salarié peut établir l’existence des heures supplémentaires qu’ils ont effectuées et d’autre part, qu’il revient à l’employeur d’apporter la preuve des horaires réellement réalisés par les salariés.
La Cour de Cassation a été très claire dans son dernier arrêt rendu le 24 avril 2013 (Syntec) « ni les dispositions de l’article 4 de l’accord du 22 juin 1999 relatif à la durée du travail, (…) ni les stipulations des accords d’entreprise des 22 décembre 1999 et 5 novembre 2004, ne sont de nature à garantir que l’amplitude et la charge de travail restent raisonnables et assurent une bonne répartition, dans le temps, du travail de l’intéressé, et, donc, à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié. »
De fait, il est vivement recommandé aux entreprises de vérifier si elles respectent les conditions jurisprudentielles suivantes :
- dépendre d’une convention collective autorisant le recours au forfait jours ;
- veiller à appliquer le dispositif aux seuls cadres ou salariés autonomes en respect de la convention collective ;
- régulariser pour chacune des personnes concernées, une convention individuelle précisant, le cas échéant, les mesures permettant de contrôler la charge de travail du salarié ;
- enfin, mettre en place les moyens nécessaires à garantir une amplitude et une charge de travail raisonnable, par exemple en disposant d’outils comme le logiciel GTA de gestion des temps et activités.
A SAVOIR :
Durant le premier semestre 2014, la chambre sociale de la Cour de Cassation statuera sur la convention des experts comptables et des commissaires aux comptes. A suivre donc !