À la loupe
Chaque semaine ce que nous disent les chiffres et les études sur le monde du travail
Dans un contexte global de violences sexistes, sexuelles et de stéréotypes, et malgré des avancées législatives et sociétales notables, un constat demeure : le monde du travail reste empreint de sérieuses inégalités entre les femmes et les hommes. L’État des lieux du sexisme en France à l’heure de la polarisation, publié en janvier 2025 par le Haut Conseil à l'Égalité entre les Femmes et les Hommes (HCE), pointe que 83 % des femmes estiment ne pas être considérées de la même manière que les hommes sur leur lieu de travail, 10 % d’entre elles rapportant avoir déjà été écartées au profit d'un homme à compétence égale.
Des salaires toujours inférieurs pour les femmes
Une réalité s’impose : la persistance de la ségrégation genrée des métiers, avec 80 % d’entre eux qui sont encore non mixtes. Le rapport note qu’alors que 44 professions sont à dominante masculine, seulement 23 sont à dominante féminine. Un déséquilibre aux lourdes conséquences puisqu’il se répercute directement dans l'accès aux postes à responsabilité et, logiquement, dans l’accès à une meilleure rémunération. Preuve en est, en 2022, le revenu salarial moyen des femmes dans le privé était inférieur de 23,5 % à celui des hommes, ces dernières ne représentant que 22 % des salariés les mieux rémunérés. Une inégalité aggravée par la parentalité, puisque le HCE pointe une chute de salaire d'environ 20 % dans les cinq ans après l’arrivée d'un enfant, et jusqu'à 40 % pour les plus bas salaires.
Violences sexistes et sexuelles : au travail aussi
En 2024, seulement 44 % des Français interrogés trouvent choquant qu'une réunion de travail ne compte que des hommes, un chiffre en recul par rapport à 2023 : la culture du « boys' club » au sein des entreprises aurait-elle encore de beaux jours devant elle ? Assurément. Elle est une réalité persistante et violente, qui accentue insidieusement l’exclusion des femmes de certains espaces professionnels, renforçant leur invisibilisation et limitant leur progression de carrière. Et c’est sans compter sur un autre constat qui fait froid dans le dos : 10 % des femmes déclarent avoir été embrassées ou enlacées par un collègue ou un homme qu'elles ne connaissaient pas.
Plus d’accidents du travail chez les femmes
Le rapport du HCE souligne en outre que, dès le plus jeune âge, les filles sont encore trop souvent orientées vers les métiers du « care » - la santé, le social et l’éducation - tous moins bien reconnus et rémunérés que d’autres professions à dominante masculine, comme l’ingénierie. Là encore, une dévalorisation mésestimée, qui se répercute lourdement sur les conditions de travail. Au cours des quinze dernières années, les accidents du travail ont progressé de 12 % chez les femmes alors qu’ils ont diminué de 22 % chez les hommes. Que retenir de ces chiffres ? Les stéréotypes de genre sont un sujet sérieux, et leurs effets loin d‘être anodins : ils influent sur la pénibilité et les risques professionnels.
Le HCE plaide pour l’instauration de quotas
Le HCE préconise un certain nombre de mesures, dont en premier lieu l’instauration de quotas afin d’encourager la mixité dans les secteurs où les femmes sont encore sous-représentées, notamment le numérique et l'informatique. En parallèle, une revalorisation des métiers du « care » pour une meilleure reconnaissance salariale et sociale serait la bienvenue. Le HCE propose également d’instaurer une meilleure transparence salariale pour une prise en compte de la valeur réelle des compétences. Il suggère aussi de renforcer dans l’entreprise la sensibilisation à la thématique des violences sexistes et sexuelles, en soutenant la formation et en systématisant une évaluation stricte des actions déployées. Des orientations que pouvoirs publics comme dirigeants doivent impérativement concrétiser pour mettre fin à ces inégalités structurelles, encore trop nombreuses et persistantes.

Journaliste
Séverine est journaliste généraliste indépendante collaborant avec divers médias régionaux et nationaux, comme le Figaro Magazine, Madame Figaro,…