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chronique - Inclusion

Encore une idée fausse : “Recruter une personne en situation de handicap, c’est compliqué”

femme souriante utilisant la langue des signes lors d’un échange en visio sur ordinateur

12 % contre 7 %, c'est le taux de chômage qui sépare les personnes en situation de handicap du reste de la population active. Un écart qui révèle une réalité dérangeante : recruter une personne en situation de handicap reste perçu comme compliqué par de nombreux employeurs.

Il est temps de braquer les projecteurs sur ce sujet pour prouver que non, ce n'est pas forcément compliqué.

Ouvert aux candidatures de personnes en situation de handicap, fermé au recrutement

"Candidature ouverte aux personnes en situation de handicap". Cette mention fleurit sur les offres d'emploi depuis la loi de 2005, mais derrière cette politesse administrative se cache souvent une réalité moins reluisante. Car malgré l'obligation légale d'employer 6 % de personnes en situation de handicap pour les entreprises de plus de 20 salariés, seuls 3,6 % des emplois du secteur privé sont effectivement occupés par des travailleurs handicapés.

Pourquoi cet écart ? Parce que recruter une personne avec un handicap reste perçu comme un parcours du combattant par bon nombre d'employeurs. L'aménagement du poste va coûter cher, il faudra adapter les emplois du temps, affecter quelqu'un pour l'accompagner... Et puis, des interrogations subsistent : ne risque-t-elle pas d'être plus souvent absente, moins productive ? Des idées qui persistent, même si personne n'ose les formuler à voix haute.

Ces préjugés ont des conséquences concrètes. Les personnes en situation de handicap restent deux fois plus touchées par le chômage. Et quand elles trouvent un emploi, 64 % ne s'estiment pas rémunérées à leur juste valeur, contre 49 % dans l'ensemble de la population.

Une méconnaissance qui freine l’inclusion

La France accuse du retard sur ce sujet. Nous imaginons encore trop souvent le handicap avec un fauteuil roulant, alors que 80 % des handicaps sont invisibles. Cette représentation erronée nous empêche de saisir l'ampleur et la diversité des situations. Car le handicap invisible prend de multiples visages : maladies chroniques comme le diabète ou l'insuffisance cardiaque, troubles psychiques comme la dépression ou la bipolarité, troubles cognitifs comme la dyslexie, ou encore migraines chroniques et phobies. Des réalités professionnelles qui peuvent nécessiter des aménagements simples : flexibilité des horaires, accès au télétravail, pauses supplémentaires ou bureaux calmes.

Et même pour les handicaps visibles, les solutions sont souvent plus simples qu'imaginées. Un bureau ajustable en hauteur, un clavier ergonomique, un logiciel de reconnaissance vocale... De plus, la plupart des aménagements sont éligibles à des aides financières de l’Agefiph. Par exemple, l’aide à l’adaptation des situations de travail peut couvrir les frais d’équipements, de logiciels ou de mobilier spécifiques, jusqu’à 5 250 euros par poste. Des soutiens complémentaires existent également pour l’étude ergonomique du poste ou la formation à l’utilisation du matériel. Cette méconnaissance du handicap au travail touche directement à l'égalité de traitement et à l'égalité des chances. Et pour cause. Comment prétendre offrir les mêmes opportunités quand on ne comprend pas la diversité des situations ? Sensibiliser le collectif de travail est indispensable pour changer les mentalités et lutter contre les stéréotypes.

La première action à mener ? Éduquer vraiment les managers et les salariés au handicap. Expliquer ce que cela recouvre, démontrer que la plupart des aménagements sont minimes et finançables. Une campagne d'affichage, des ateliers de formation ou du mécénat de compétence peuvent permettre de mieux comprendre les défis rencontrés.

Heureusement, des entreprises montrent la voie. Accenture normalise le sujet du handicap avec ses collaborateurs en menant des actions de sensibilisation dès l'intégration, des ateliers avec casques de réalité virtuelle, et une formation systématique des managers et des recruteurs. “Le sujet du handicap n'est pas du tout tabou, nous en parlons facilement, c'est normalisé. En 10 ans de vie professionnelle, c'est la première fois que je tombe sur une entreprise aussi investie“ témoigne une collaboratrice en situation de handicap. Cdiscount mise sur sa "Handi Team", un réseau de collaborateurs volontaires qui relaient les engagements. Le groupe Accor, pionnier avec six accords successifs depuis 1992, a même embauché un sportif de haut niveau de cécifoot pour sensibiliser ses équipes.

Ces exemples le prouvent : recruter une personne en situation de handicap n'est pas plus compliqué que recruter n'importe qui d'autre. C'est juste différent. Et cette différence peut devenir une richesse pour l'entreprise.

Experte juridique & RH

Ancienne juriste et RH, Sonia n’a jamais tourné le dos à l’entreprise… même si son rêve était d’écrire des scénarios pour le cinéma. Aujourd’hui…

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