Mythes de bureau
Quand nos idées reçues sur le travail ont la vie dure
Par culpabilité ou peur d’être perçus comme défaillants, de nombreux salariés sous-estiment les symptômes de burn-out. Mais si l’on regarde de plus près, on peut voir que l’épuisement professionnel est davantage une affaire d’environnement de travail que de fragilités individuelles. Alors, que faire ?
La personnalité, trop souvent mise en avant
Imaginez deux salariés. Même poste. Même entreprise. Même pression. Au bout de 6 mois, l’un s’effondre, l’autre tient bon. Pourquoi ? Parce que chacun a son propre seuil de tolérance face au stress, influencé par ses capacités cognitives, physiques et émotionnelles. La littérature sur le burn-out le reconnaît d’ailleurs unanimement : certaines prédispositions augmentent le risque. Ceux qui manquent d’estime de soi ou doutent de leur efficacité personnelle se sentent plus vite submergés par les exigences du travail, ce qui accentue leur stress. Les profils perfectionnistes, qui cherchent à tout contrôler et placent la barre très haut, s’épuisent dans une quête de maîtrise impossible. Mais attention à ne pas inverser cause et conséquence. Ce n’est pas la personnalité qui déclenche le burn-out, mais l’environnement de travail qui le rend inévitable. Même les salariés les plus résistants finissent par flancher quand la pression devient insoutenable.
Quand l’organisation craque, les salariés s’effondrent
« C’est l’organisation du travail qui fait le terreau du burn-out », déclarait Marie Pezé, psychologue spécialiste du sujet, dans une interview en 2022. Une prise de position validée par l’Organisation mondiale de la santé qui reconnaît officiellement le burn-out comme un syndrome lié à un stress chronique au travail. Surcharge de travail, manque d’équité et de moyens, pression des délais, rythme effréné, absence de soutien, conflits latents, responsabilités floues… Autant de facteurs structurels et organisationnels qui transforment le quotidien des collaborateurs en terrain miné. Et quand l’organisation craque, c’est toute l’équipe qui vacille. Alors oui, aider les salariés à mieux gérer leur stress en leur apprenant à détecter les burn out : signes d'alerte peut limiter la casse. Mais si l’environnement reste toxique, ce ne sera pas suffisant. Il est alors vital d’agir en profondeur, sur les causes professionnelles. Mais comment ? Certaines actions sont simples et immédiates : apporter du soutien, donner plus de flexibilité et d’autonomie, alléger la charge de travail pour qu’elle reste soutenable. Ces ajustements ne demandent ni gros moyens ni réformes profondes, mais ils peuvent faire une vraie différence au quotidien.
Outiller les managers
Les managers, en première ligne comme des boucliers face à la pression organisationnelle, doivent également être mieux outillés. D’abord pour eux-mêmes : en leur offrant des espaces de dialogue pour exprimer leurs difficultés, en ajustant leurs propres objectifs pour éviter une surcharge intenable. Puis pour leurs équipes : en étant formés à la gestion du stress et des conflits, en disposant d’outils concrets pour piloter la charge de travail et prévenir l’épuisement avant qu’il ne s’installe. En somme, le burn-out n’est pas une question de faiblesse individuelle, mais le symptôme d’un environnement de travail défaillant. Avec 30% d’actifs ayant déjà été en burn-out au moins une fois dans leur carrière ( dernier baromètre publié en septembre 2024), n’est-il pas (enfin) temps de repenser nos critères de résilience et de succès ?

Experte juridique & RH
Elle observe le monde du travail avec curiosité et exigence. Passionnée par les enjeux humains, elle aime questionner les certitudes, explorer de…
Mythes de bureau
La chronique bouscule les préjugés, les idées reçues et les croyances parfois fausses qui façonnent nos comportements professionnels. Parce que la réalité du travail se joue dans les nuances et rarement dans les certitudes, « Mythes de bureau » interroge ce qui semble évident et invite à dépasser les stéréotypes qui limitent notre vision du travail.