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Article - Santé sécurité au travail

Les effets délétères du travail de nuit : analyse et recommandations d’une étude suédoise

Soignante examinant des dossiers de nuit sous une lumière bleue

À la loupe

Chaque semaine ce que nous disent les chiffres et les études sur le monde du travail

Une étude menée auprès de soignants en Suède publiée en janvier 2025 dans l’International Journal of Nursing Studies confirme que le travail de nuit, surtout lorsqu’il est intensif ou mal régulé, expose à un risque significatif de troubles du sommeil. Un constat qui ne laisse pas indifférents les professionnels des RH.

Horaires décalés et risques réels

Choisi comme subi, le travail de nuit concerne aujourd’hui près de 20 % des salariés européens, selon cette enquête axée sur les conditions de travail. Un taux qui grimpe - sans surprise - à 40% dans le secteur hospitalier, où l’organisation reste liée à l’obligation de continuité de soins.  Au total, près de 26 000 professionnels de santé suédois ont été interrogés et le résultat est sans ambiguïté : il existe une corrélation entre travail de nuit et troubles du sommeil médicalement diagnostiqués. Ainsi, les salariés ayant travaillé plus de 66 nuits sur six mois présentent un risque augmenté de 77 % de développer un trouble du sommeil par rapport à ceux n’ayant jamais travaillé la nuit. L’étude révèle que sur 326 cas de troubles du sommeil recensés au long des quatre années de suivi, les diagnostics intègrent des insomnies chroniques et de forts troubles du rythme circadien (rythme biologique d'une durée de 24 heures). Des impacts qui ne sont par ailleurs pas les mêmes selon le profil des salariés. Les moins de 40 ans, souvent affectés aux postes les moins qualifiés et les plus contraignants, sont surreprésentés parmi les effectifs de nuit. À l’instar des aides-soignantes, fréquemment soumises à un rythme exclusivement nocturne, et donc particulièrement exposées, ce qui pose la question de la justice organisationnelle, comme l’évoque à juste titre l’étude.  

Un enjeu d’organisation et de prévention pour les DRH

Le travail de nuit ne perturbe pas que le sommeil; plus largement il affecte la santé mentale, la concentration, la performance et l’équilibre entre vie personnelle et professionnelle. En effet, les troubles du sommeil sont directement associés à une augmentation de la fatigue, du stress, des sautes d’humeur mais aussi une élévation du risque d’accidents professionnels, voire d’erreurs dans le domaine médical. Des effets pervers qui peuvent fragiliser la cohésion des équipes comme nuire à la qualité des soins prodigués. D’où l’urgence d’agir comme le pointe l’étude. En cause principalement, les fameux « quick returns », qui sont les plages de repos inférieures à 28 heures entre deux nuits ou à 11 heures entre un poste d’après-midi et un poste du matin. Les travailleurs de nuit ayant subi plus de 39 « quick returns » sur six mois présentent un risque multiplié par 1,89 de troubles du sommeil, par rapport à ceux en ayant subi moins de 8. Des données qui poussent naturellement les DRH à repenser les roulements en s’efforçant de limiter les nuits consécutives, espacer les reprises après des nuits et éviter de multiplier les rythmes inversés. Autre enjeu relevé par l’étude : la prévention, et la nécessité de l’intégrer en identifiant d’une part les signaux faibles (absentéisme, baisse de vigilance, irritabilité) et en sensibilisant d’autre part le personnel encadrant.

Protéger à tout prix le « capital humain »

Globalement, en entreprise, la reconnaissance du travail de nuit ne peut plus se limiter à une majoration salariale. Il devient nécessaire de proposer un accompagnement individualisé : bilan de santé régulier, conseils en hygiène du sommeil, accès à des espaces de repos adaptés, ou encore soutien psychologique pour prévenir l’épuisement professionnel. Sans oublier un suivi spécifique pour les classes d’actifs les plus vulnérables comme les femmes enceintes ou les salariés seniors, par exemple. Car le travail de nuit est une réalité incontournable dans de nombreux secteurs d’activité et ses effets sur la santé ne doivent plus être ignorés.

Journaliste

Séverine est journaliste généraliste indépendante collaborant avec divers médias régionaux et nationaux, comme le Figaro Magazine, Madame Figaro,…

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