Retour

  3 mins

 

Article - Étude

Changer d’employeur : un choix de plus en plus stratégique

Salariée accueillie chaleureusement par ses nouveaux collègues lors de son arrivée en entreprise

À la loupe

Chaque semaine ce que nous disent les chiffres et les études sur le monde du travail

Quête de sens, meilleure reconnaissance ou conditions de travail plus profitables, franchir le pas du changement d’entreprise est devenu commun en France, particulièrement depuis la crise sanitaire. Ainsi, en 2023, 18,3 % des salariés du privé changeaient d’employeur, contre 17 % en 2018, d’après les résultats de l’étude « Emploi, chômage, revenus du travail » publiée par l’INSEE en 2024. Pour fidéliser les collaborateurs, les entreprises doivent proposer une expérience de travail plus valorisante.

Le salaire n’est plus le seul critère

Cette dynamique de changement redessine clairement les contours de la mobilité professionnelle, obligeant dans un même temps les entreprises à repenser leurs stratégies RH. La raison ? Un rapport au travail qui a changé, et des motivations qui ne sont plus uniquement économiques. Bien que l’augmentation du salaire reste la première raison évoquée pour 26,3 % des sondés, les conditions de travail ont désormais une importance capitale dans la réflexion menée : horaires, télétravail, temps de trajet, ambiance ou équilibre entre vies professionnelle et personnelle, autant de critères qui sont passés au crible. Vient ensuite le désir d’épanouissement professionnel avec 13,2 % de salariés en quête d’un poste considéré comme plus intéressant. Enfin, alors que 13,9 % souhaitent changer de métier, voire de secteur d’activité, 9 % envisagent l’entrepreneuriat, aspirant à davantage d’autonomie.

Un gain financier contrasté

L’étude révèle qu’en 2022 les salariés ayant quitté leur entreprise ont vu leur salaire progresser de 2,9 %, contre 5,7 % pour ceux qui sont restés. Un différentiel négatif qui s’explique soit par la perte d’avantages liés à l’ancienneté, soit, dans certains cas, par une situation de rupture de contrat préalable « subie », comme un licenciement. Un constat à relativiser, puisque certaines catégories sortent en revanche leur épingle du jeu. Les jeunes de moins de 30 ans, souvent au début de leur parcours et moins exposés aux effets de l’ancienneté, bénéficient d’un effet sur la rémunération neutre ou légèrement positif. Pour les salariés en CDD, la rupture est même profitable : leur mobilité entraîne une hausse de salaire moyenne de 13,2 %. Les résultats démontrent également que la mobilité a un effet positif sur le temps de travail. En 2022, 30 % des salariés changeant d’entreprise ont obtenu un poste avec une durée de travail supérieure à ce qu’ils avaient, un gain d’heures qui peut peser dans leur budget mensuel, particulièrement lorsque le pouvoir d’achat est égratigné par un contexte économique tendu.

La mobilité avantage les cadres et pénalise les ouvriers

Considérée comme un levier de carrière, la mobilité ne bénéficie pas à tous les profils de salariés de manière équitable. Sans grande surprise, les cadres, plus libres et autonomes dans leurs arbitrages et davantage rompus à l’exercice de la négociation, parviennent en général à très bien valoriser leurs départs, et leurs arrivées ! Ce qui contraste nettement avec les ouvriers, davantage pénalisés avec une perte moyenne de 4,1 points de salaire, car exposés à des transitions subies. Côté tranches d’âges, ce sont les 30-49 ans qui restent les plus ouverts à la mobilité, avec une hausse de 1,9 point du taux de départ depuis 2018. Une tendance qui trouve son origine dans les mutations que connait actuellement le marché du travail : le changement d’entreprise devient un véritable outil d’ajustement pour certes gagner plus, mais aussi travailler mieux, ou encore faire s’aligner valeurs personnelles et professionnelles.  

S’il y a bien une leçon à tirer de cette étude pour les entreprises, c’est que si la rémunération permet de retenir provisoirement les talents, une expérience de travail plus valorisante et personnalisée, axée sur l’écoute, la reconnaissance et la possibilité d’une évolution de carrière, reste la clé d’une fidélisation des collaborateurs.  

 

 

Journaliste

Séverine est journaliste généraliste indépendante collaborant avec divers médias régionaux et nationaux, comme le Figaro Magazine, Madame Figaro,…

Pour ne rien manquer, abonnez-vous à la newsletter Média ✉️